La cathédrale souterraine à Saint-Martin de Pallières

Le château de Saint-Martin de Pallières (Var) a été édifié aux XII° et XIII° siècles. Le bâtiment présente alors un aspect différent d’aujourd’hui : les trois tours sont couvertes de poivrières de tuiles et le château-fort semble inaccessible sur son éperon rocheux.

Les grandes familles provençales se sont succédées à la tête de la seigneurie : les Vintimille, les Castellane, les d’Agoult, les Forbin.
C’est en 1604 que Pierre 1er de Laurens, Conseiller au Parlement de Provence, acquiert une partie du domaine et aménage le bâtiment en demeure digne des parlementaires aixois. Pour achever l’ensemble, les Laurens entreprennent en 1730 la construction d’un vaste parc à la française. Pour cela, les collines situées au levant sont arasées et la terre déplacée jusque devant le château afin de créer une esplanade, supprimant ainsi de manière définitive la position défensive au sommet du promontoire rocheux ; les travaux vont durer 20 ans.
Les besoins eau sont alors énormes. Afin de pourvoir à l’arrosage du jardin du jeune parc, il devient impérieux de mettre à disposition l’eau nécessaire aux besoins du domaine. Dans cette région aride, où il tombe de grandes quantités d’eau sur une courte période d’automne et de printemps, la problématique consiste à recueillir l’énorme flux et le stocker à l’abri pour permettre une utilisation durant les périodes de sécheresse.
C’est en 1747 qu’est entreprise la construction de la grande citerne dont les dimensions en font à cette époque la plus grande citerne d’Europe, elle sera achevée en 1750. Conçue pour alimenter un jardin à l’italienne qui n’a jamais vu le jour, elle sera utilisée pour arroser les milliers de jeunes arbres du parc de 7 ha pendant 5 ans.
Sur plus de 500 m², 20 piliers soutiennent les voûtes situées à 6 mètres de hauteur. La capacité en eau est de 2800 m3. La citerne est alimentée par le ruissellement des eaux de pluie qui tombe sur les collines environnantes et dont les pentes ont été rectifiées afin d’acheminer le flux vers un fossé collecteur, l’eau s’engouffre alors dans la citerne.
Au centre du toit terrasse de la citerne se trouve le puisard qui permettait aux femmes du XVIIIème siècle de prélever l’eau et la transporter au moyen de barriques charriées par des mulets afin d’arroser chaque arbre planté sur les 7 hectares du parc à la française. Dans les archives sont conservées les listes des noms de ces femmes ainsi que le montant du salaire qui leur était versé : 6 sols par jour, à l’époque, c’est le salaire d’une journée d’ouvrier !
Sur le mur ouest de la citerne se trouve un escalier suspendu « en corbeaux » qui était alors le seul accès à la citerne et qui permettait les visites « techniques ».
C’est par cet accès qu’enfant, loin de la surveillance des parents, nous venions avec mes cousins dans le bateau que nous avions disposé dans la citerne et avec lequel nous « naviguions » entre les piliers en essayant d’aller plus loin à chaque navigation.
En 2017, nous entreprenons de retirer l’épaisse couche d’alluvions qui encombre sur 1,50 m d’épaisseur le fonds de la citerne rendant très humides les écuries qui jouxtent la citerne et que nous avons transformées en habitation.

A la découverte des réelles dimensions de la citerne, nous décidons d’accueillir du public afin de partager ce lieu unique et insolite qui accueille également en juillet et août des concerts de musique classique, l’acoustique du lieu étant remarquable. www.cathedralesouterraine.com

La grande citerne en totalité a été inscrite au titre des monuments historiques par arrêté du 14 novembre 2003, en même temps que les façades et toitures du château et des communs et le parc en totalité avec ses éléments structurés.